Quand une naissance arrive dans une famille aujourd’hui, on envoie un SMS à tout son carnet d’adresses, avec la photo du nouveau-né. On voudrait annoncer la nouvelle au monde entier pour que la joie remplisse les cœurs ! Dans l’Evangile, c’est la même chose. Des millions d’étoiles sont allumées dans la nuit. Les anges veulent annoncer la naissance de Jésus au monde entier. Noël est la fête de la joie. Et l’ange précise : « Je vous annonce une grande joie pour tout le peuple. » Car la joie ne peut être une vraie joie que si tout le monde peut la vivre. C’est pour cela que les premiers à qui elle est annoncée sont des bergers. Ces hommes pauvres vivant en marge des villes étaient souvent mal considérés, soupçonnés d’être des « chapardeurs ». C’est à eux que la nouvelle est annoncée en priorité.

Sinon, ils auraient risqué d’être oubliés, de rester en marge, et la joie n’aurait pas été une joie pour tous. Les santons de Provence résument bien cela : c’est tout le village dans sa diversité qui est invité à la crèche, les riches comme les pauvres.

LA MAGIE DE NOEL

Dans notre monde troublé, Noël sera l’occasion de nous rassembler pour retrouver une période paisible, fraternelle, pleine d’amour et de générosité.

Plutôt que de désespérément pleurer sur ce qui ne sera pas « comme d’habitude », c’est peut-être là l’occasion de nous interroger sur la signification profonde de cet « évènement » et la manière dont nous savons le préparer, l’accueillir. Le récit de Noël n’est pas une historiette merveilleuse. Il parle d’espérance malgré tout.

D’une étoile qui vient guider les voyageurs égarés. D’un désir exaucé après si une longue attente. De la fragilité d’un nouveau-né proposée comme accomplissement de la puissance divine. Une bonne nouvelle oui, à fêter comme il se doit évidemment, mais qui ne fait l’impasse sur aucune épreuve de la vie.

Au fond, chacun est devenu libre de donner à ce jour particulier du 25 décembre un sens, religieux ou non. Ce qui fait de Noël une fête éminemment polymorphe, entre sacralité et idolâtrie, recueillement et exubérance, retrouvailles et solitude.

Car qu’est-ce que croire, au juste ? Je trouve extrêmement gênant que l’on utilise le même verbe – croire – pour désigner la foi en Dieu et celle dans le Père Noël. Cruelle ironie qui place le bonhomme en rouge, devenu l’icône de la consommation, à égalité sémantique avec l’Éternel.

L’obstination que l’on a mise à perpétuer la fête de Noël, en dépit de l’estompage progressif de sa dimension religieuse, montre à quel point l’humanité a besoin de repères fermement ancrés.

Alors, en cette année, si troublée et pleine d’incertitudes, contemplons nos crèches de Noël avec le regard de toutes celles et ceux qui vivent des vies difficiles et qui trouvent un grand réconfort autour de cet enfant démuni, qui vient au monde dans la mangeoire du bétail au milieu des bergers. Et soyons solidaires, ensemble, pour porter cette espérance à tous.

Jésus veut ainsi nous signifier que seule la vie de l’homme a de la valeur à ses yeux, que tout le reste est éphémère et insignifiant. Sa pauvreté matérielle et son détachement des biens d’ici-bas lui donnent la force de dire leur quatre vérités aux puissants de ce monde et d’adresser des mots de compassion à tous les persécutés de la terre.

Nous savons bien que le vrai partage de Noël se situe avant tout dans la relation. C’est la chaleur de l’échange les uns avec les autres que nous cherchons tous à Noël. Les cadeaux ne sont vrais que s’ils sont un signe de cette relation. Comment donc vivre Noël en évitant que des personnes restent seuls, isolées, oubliés ? Sinon, ce ne serait plus vraiment Noël.

Noël, comme un itinéraire sacré, une route intérieure qui nous mènerait tout droit vers la fraternité, pas celle des beaux discours, mais celle des mains tendues par-delà les souffrances et la mort, la haine et l’indifférence. Haute voie de l’impossible qui, soudain, devient chemin escarpé des possibles. Et l’homme qui marche, qui grimpe ce sentier, s’élève et se relève et grandit à chaque pas qu’il fait vers la cime de la Parole qui lui murmure, toujours et sans cesse : « Viens, suis-moi ! » Chemin rude, chemin à perdre souffle. Car la vie nous est lourde, difficile, déprimante et inattendue, telle que nous la subissons aujourd’hui avec ce monde de barbarie qui chamboule nos vies.

Faisons nôtre plus que jamais cet enseignement que Jésus est venu apporter sur terre, il y a 2024 ans: Aimons-nous les uns et les autres, aimons même ceux qui se comportent comme des ennemis et qui dénaturent, le temps est venu pour la période de la compassion, de la réconciliation, de la compréhension, du pardon et de l’amour.

Ceux qui vivent dans la misère et l’humiliation quotidienne ont une façon particulière de partager le rituel de Noël et de lire l’Evangile, à partir de leur expérience de vie. Comment se fait-il que la fête de Noël soit si importante dans le cœur des plus pauvres, même de ceux qui ne sont pas chrétiens ? Remémorer et entretenir les souvenirs peut procurer plus de plaisir que les cadeaux. Ne se retrouvent-ils pas profondément dans l’histoire de la naissance de Jésus ! La joie de la naissance de cet enfant porte en elle l’espérance des pauvres, dans la plupart des dénuements, ce besoin de partager avec ses proches cette période particulière de paix, d’éclairage et de réconciliation est salutaire.

Une image archétypale

Au cours de notre parcours de vie, il n’est pas rare de vivre des conflits intérieurs et extérieurs qui nous donnent le sentiment d’être dans une impasse. Ces moments de tension nous font ressentir un douloureux inconfort et souvent une grande angoisse, car une partie de nous est appelée à mourir.

Nous devons nous enrichir de nouveaux apports, pour renaître autrement et évoluer ainsi vers plus de conscience et plus d’humanité. Quand enfin nous arrivons à renoncer à une situation à laquelle nous étions attachés, à faire le deuil d’une relation, d’une croyance ou d’une idéalisation, sur lesquelles nous avions, jusque-là, fondé nos vies et qu’il a été si difficile de quitter, il n’est pas rare de voir apparaître dans nos rêves un bébé. Une sorte d’« enfant divin », qui symbolise la nouvelle prise de conscience, le potentiel de renaissance et d’humanisation qui habite chacun d’entre nous. Une figure du Soi, dirait Carl Gustav Jung, qui laisse souvent un sentiment de « sacré ».

Cette figure de l’enfant divin est une image archétypique qui appartient à l’inconscient collectif. Mais qu’est-ce qu’une image archétypique et qu’est-ce que l’inconscient collectif ?

Selon Carl Gustav Jung, les archétypes sont des modèles « instinctifs » de représentations mentales. Ils sont communs à toute l’humanité, et se déclinent en une multiplicité d’images symboliques selon les civilisations et les cultures.

Les enfants divins sont présents dans les contes et dans de nombreux mythes, en Egypte ancienne, en Inde, au Tibet, en Finlande et ailleurs. Ils sont souvent liés à une naissance virginale et incarnent le renouveau. Le symbole de l’enfant nouveau-né fait le lien entre notre existence biologique concrète, le bébé, et cette capacité de transformation intérieure, de renouvellement, si difficile à exprimer. C’est bien à cela que servent les symboles, à évoquer ce qui dépasse les limites de notre entendement, de notre capacité à définir par des mots ou des concepts. Et si cette image du bébé fait encore écho dans nos profondeurs, malgré notre tendance générale à vouloir tout expliquer, rationaliser, dominer par la pensée, c’est qu’elle vient rejoindre les couches les plus instinctives et les plus primitives de notre psyché. Le processus de civilisation nous a progressivement coupés de la nature, des bases concrètes et corporelles du symbole, mais chacun garde dans le tréfonds de son âme la soif de se relier, d’éprouver une profonde résonance, une résonance « sacrée ».

Les Hébreux ont introduit le fait que l’histoire avait un Créateur, une origine, un commencement, se démarquant des mythes, des dieux « païens », du temps cyclique et des puissances magiques. Mais « Dieu est intervenu jusque dans l’inconscient collectif pour le sauver et pour l’accomplir… Comment ce salut atteindra-t-il notre inconscient s’il ne lui parle pas son langage, s’il ne reprend pas ses catégories ?». C’est ainsi qu’avec l’Enfant Sauveur, le christianisme fait le lien entre le temps historique du monothéisme d’Israël et l’originel-éternel des archétypes présents en chaque être humain.

Noël : le « dénuement libérateur »

Jésus veut ainsi nous signifier que seule la vie de l’homme a de la valeur à ses yeux, que tout le reste est éphémère et insignifiant. Sa pauvreté matérielle et son détachement des biens d’ici-bas lui donnent la force de dire leur quatre vérités aux puissants de ce monde et d’adresser des mots de compassion à tous les persécutés de la terre.

Nous savons bien que le vrai partage de Noël se situe avant tout dans la relation. C’est la chaleur de l’échange les uns avec les autres que nous cherchons tous à Noël. Les cadeaux ne sont vrais que s’ils sont un signe de cette relation. Comment donc vivre Noël en évitant que des personnes restent seuls, isolées, oubliés ? Sinon, ce ne serait plus vraiment Noël.

Nous n’oublions pas les exilés et tous les migrants qui fuient la persécution ou la famine. Souvenons-nous que Jesus, dès sa naissance a dû fuir en Egypte avec Joseph et Marie parce que sa vie était en danger, comme les exilés d’aujourd’hui.

Ses fidèles disciples sont appelés, aujourd’hui plus que jamais, à Le contempler dans sa crèche, pour l’imiter dans son dénuement et pour retrouver en cela la force d’une liberté leur permettant d’affronter les faux prophètes de notre temps, qui mènent nos contemporains à la dérive et au chaos d’un monde sans repères, ni foi, ni loi.

La force des rituels

Ces fêtes de fin d’année concentrent le plus de rituels et de traditions. Noël est loin de n’être qu’un rendez-vous confessionnel. L’aspect chrétien est important mais s’y mêlent des rites ordinaires et un cérémonial souvent propre à chaque famille.

C’est la messe de minuit – que les chrétiens ne ratent pas – même si on ne met jamais les pieds dans une église; le menu du réveillon, reste immuable d’une génération à l’autre, couplé de rituel d’une chorale improvisée.

On passe en boucle des CD de chants de Noël, c’est incontournable. Les enfants trouvent cela ringard, mais c’est la madeleine de Proust pour les adultes ! De nombreuses radios, plateformes musicales en ligne et applications créent même leur playlist « spéciale réveillon » pour diffuser un fond sonore idéal.

Ces témoignages incarnent le besoin de se retrouver autour de souvenirs communs propres à cette période. Ce moment privilégié permet de maintenir les liens nécessaires dans une période où le manque de repères peut créer de l’angoisse.

Alors, en cette année, si troublée et pleine d’incertitudes, contemplons nos crèches de Noël avec le regard de toutes celles et ceux qui vivent des vies difficiles et qui trouvent un grand réconfort autour de cet enfant démuni, qui vient au monde dans la mangeoire du bétail au milieu des bergers, et soyons solidaires, ensemble, pour porter cette espérance à tous.

On dit qu’une belle histoire se termine par des chansons.

Traduit dans plus de 300 langues, « Douce nuit, sainte nuit » fait partie des plus célèbres cantiques de Noël.

Entonné pour la première fois le soir de Noël 1818, ce cantique aux paroles à la fois si simples et si justes réveilla une certaine émotion. Pour cette douce évocation de la Nativité, ce fut le début d’un long voyage. Par le jeu du bouche-à-oreille et des migrations, l’air s’exporta rapidement à travers les continents. Mais ce sont les missionnaires catholiques et protestants qui le firent connaitre à la fin du XIXème siècle. Et depuis, chaque année, des millions de personnes l’écoutent ou la chantent, lors de la messe de minuit ou en famille.

Douce nuit, sainte nuit !
Dans les cieux ! L’astre luit.
Le mystère annoncé s’accomplit
Cet enfant sur la paille endormi,
C’est l’amour infini !
C’est l’amour infini !
Saint enfant, doux agneau !
Qu’il est grand ! Qu’il est beau !
Entendez résonner les pipeaux
Des bergers conduisant leurs troupeaux
Vers son humble berceau !

Pour les cadeaux, puis-je vous rappeler que j’anime une association humanitaire et que votre don permettra de sauver des enfants démunis. A votre bon cœur !

Je vous souhaite un Noël de joie, de paix (et peut-être de réconciliation) et une belle année 2025.